Francine Laugier - Terre, terre


LES MOTS D’ESPRIT

La marque au front comme le troisième œil, ne pouvais-je entendre qu’il m’en parla si tard ? Toujours une ombre dans ma vie, je réfléchis : j’avais tort. Ma force passait dans l’ombre de la radio, parfois du fantasme. Mais dois-je avoir peur de ce qui fut ? Non ! Importe ce que je deviendrai, que je construirai, que ce soit avec mes plumes, ma parole, mes gestes gratifiants, mes sentiments. Toujours l’attrait de réparer, mais qui voit la beauté ? j’avais choisi, valorisant il y a un long moment déjà. Rester fidèle à ce que je suis, surtout pas de compromission !


Mon amour, je me suis soutenue de ton espoir. Attelée à une simple planche dans le rapide courant, tu m’appelles de la rive, je viens enfin vers toi. La mort n’est pas mon cortège, les mots sont mon cortège. Plus rien ne me fera, face à la médisance, baisser les bras. Tes baisers qui enflèrent mes lèvres, c’est sur ton visage que se grava une larme. Je tape du poing, mes frissons sont invisibles.

Trouver un bien être, la vie est belle.


Ma naïveté m’a quittée, j’avais besoin de certitudes. Je me sens belle. Les incantations ne sont pas ma tasse de thé. Quel caractère ! Force en moi, comme la sève de l’arbre. La graine des générations m’habite comme habit neuf aux jeunes filles, qu’importe alors la couleur du vêtement s’il est à la bonne taille. L’éveil est de qualité, l’emporte sur le rêve, me laisse attentive à mon penchant vers le bien. Brillent les étoiles, tout vibre de la même façon.


Nous en viendrons à bout du mal : à dieu le mal. Jeu. Je de mots. Nous serons aussi des êtres d’humour. J’ai envie de rester dans le présent, j’en appelle au bien. Les murmures des prêtres. L’officine, comme la pharmacie, garde le vin et le pain dans un grand placard. « Ceci est mon sang, ceci est mon corps ». Cela n’a ni queue ni tête, mais toujours nous comptons, toujours nous mesurons. Nous traduisons le je. Quand au jeu il y a les jeux de mots.


Toujours aiguisée, la lame de notre sagesse. Cela ne nous fait pas de mal, cela nous tient aux aguets du bien. Je me sentis en paix avec la communauté de ma région, j’en oubliai le monde qui se rappela à moi sous les traits de la jeunesse. Quels tourments m’empêchent de vivre avec les autres ? Le mal n’a pas besoin que l’on pense à lui. C’est le bien qui doit prendre toute notre attention, sans que nous nous prenions pour « l’élue ». Passer l’épreuve de l’ombre ne doit pas nous faire oublier notre grande humilité face à la vie, face aux autres ; pour enfin faire éclater notre joie.


Hier au soir une étoile est née. Toujours la matière se réunifie, les atomes n’aiment pas la solitude. L’univers lutte pour sa survie. L’univers, un bien grand mot ! Pourtant c’est à cette échelle là que mon regard se pose, et la terre chante sa ténacité. Moi qui pensais la vie comme une rengaine, ce fut le chaos. Une étoile est née pour combien d’enfants ? Je ne suis pas très courageuse, la peur de la mort héroïquement m’a soutenue. L’infiniment grand m’intéresse plus que l’infiniment petit. Si près de l’humain, la lune où mon lunatisme se réfugie. Ne me jugez pas, j’ai tremblé à votre rythme, je n’ai pas voulu la fin du monde. La pierre est dure, ma chair fut tendre ; ne voyez-vous pas ? tout vit. Là est le plus grand secret.


Les uns sur les autres, pourtant quelle solitude ! Je ne sais déjà plus qui tu es. À toi, si je devais aujourd’hui écrire, je chercherais tellement mes mots qu’ils n’iraient plus droit à ton cœur. Mettre des gants, sied peu à l’amitié. Je me suis faite à ton silence, j’arrive parfois à t’imaginer hostile à ce que je suis, et cela arrête mon geste de t’écrire. J’ai du mal à savoir encore ta beauté, ton image s’est trop éloignée de ce que je suis devenue. Si tu le veux, c’est à toi à prendre la plume, à combler le fossé de ces nuits sans message, pour me dire : oui c’est possible, notre amitié mérite le jour. Si je pense notre ciel, les nuages sont bleus.


Sur la revue de la jeune femme l’image d’un enfant tout rond. La maternité berce ses rêves, transperce ces temps de guerre, comme pour dire non au désastre que laisse la folie. Comme un diamant dont les atomes seraient devenus fou, ton âme le reconstruit avec ta chair et ton sang mêlés à l’amour. Dans cette froide nuit l’enfantement me bouleverse, moi qui pourrais être ta mère. Des enfants j’en veux cent, mille, j’en veux comme des étoiles par milliards.


Ce beau pays de France, dont le premier philosophe dit « je » en s’adressant aux autres, comme l’on s’adresse à un intime. Admiratives, les Alpes regardent leurs vallées ; l’océan et les mers sont ses ouvertures vers le monde. Son blé et ses vignes, ainsi que ses poètes, font sa langue native. Tous parlent de ce bout de terre avec une lointaine justesse. Les accents s’y mêlent. Nous disons faire « des mots d’esprit », et chacun les savoure dans cette belle langue.





Francine Laugier, février 2015.




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© Francine Laugier, février 2015.
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