Francine Laugier - Terre, terre


L’art de la lettre

Le drapeau de la terre flotte au vent, doux rêve d’adolescents et de vieillards. L’urgence du dire, fête des mots : l’ancien humanisme.

Quand souffre la chair, et que se tait la voix, quand la promesse dit vrai, alors mon intégrité, d’une chaise à l’autre, d’une fatigue à l’autre, boit le vacarme de la nuit. C’est à ce moment-là que, d’un sursaut, mon âme défend mon corps et mon esprit.


La mer se reflète dans le ciel. Bleu-mer, sa couleur a déteint sur le ciel. Profondeur qui me fait rester sur la terre ferme. Après tant de tensions, une détente : se laisser couler dans le ciel bleu-mer. Être bien dans ses meubles, vouloir le vent comme guide spirituel. Reste tant de choses, cette maison qui se détruit conte nos épreuves. Mais voici que la nervosité reprend. Que mon intégrité ne soit pas touchée, avec les mouettes qui planent, je suis assez forte pour voir la beauté, et défaire les nœuds de vipères.


J’oublie, j’oublie les maux qui hypnotisaient mes recherches. Les mots chargés de maux. Je commence à oublier les peurs, ces piques et ces fous rires d’imagination.

La jeunesse flirtait, jouait au foot, allait danser ; pour eux ce sera les plus beaux moments de leur vie. Ils nous croient plus vieux que nous sommes.

J’oublie, comme une fée qui avec sa baguette magique ne fait plus apparaître que le meilleur de soi. J’aimerais un jour me souvenir pour être une passeuse, mais déjà ma gorge se serre. Ce soir je suis pour l’oubli. À la recherche de ma terre sans mal, je vais avec force et esprit contre la cruauté. Devant je dresse vie et bonheur, la chère liberté. Je suis pour la force du bien, et le bonheur devant moi. Je me dresse contre la souffrance.


Choisir la terre comme île. Mère, nous n’avons rien pu nous apporter, pourtant c’est maintenant que je réalise combien est riche l’âge d’être grand-mère, et combien le pardon est puissant. Nous rêvons de festins de dieux, nous trouvons parfois le goût d’un bon vin, mais combien se creusent sur nos fronts nos sueurs froides. L’oubli que nous appelons de toutes nos forces, pour une attention qui nous laisse un semblant d’humanité, pour une sage bonté.


Ils aiment le courage, ils aiment la vie. Nul doute qu’ils aimeraient nous donner leur feu. Mais nous restons encore « des paysans ». Nous nous faisons mal quand on se mêle trop de nos affaires. Et puis il y a les bons amis et les mauvais amis. Prospérer et nous verrons bien si un jour le partage se fera plus harmonieux. Je ne suis plus « de verre » et je retrouve le confort d’une intimité. M’intéresse le signe, l’écriture. Je ne me sens pas différente de mes contemporains : l’essentialisme, pas de saut qualitatif, l’humanité s’en sortira.


Au printemps, la procession des chenilles, à la queue leu-leu, que nous écrasons sans faire exprès. Qu’elle entité prient-t-elles, pour s’endormir dans leur cocon, sur les branchages des arbres généreux ? S’éveiller avec des ailes, la vitesse tant accrue. Puis, s’élancer à se brûler sur « la fée électrique ». Même si tu n’es pas papillon crois en la mutation. Ne doute pas de la célérité qui rajeunit le corps et l’esprit.


Pourquoi perdre de l’une, ce que nous saisissons de nouveau, de l’autre main ? Nous fûmes toutes deux naïves et sincères. Tu m’as écrit « L’amitié est affaire de Dieu. Crois-y ». À mon tour de te répondre « J’ai eu la grâce » dans notre amitié. Tant de pleine lune dans le même champ-temporel ; la même attente de recevoir chacune notre courriel. Le froid, la faim, rien n’arrêtait notre lien ; « sœurellement » comme tu me signais tes premières correspondances.

Tu me jalousais mon compagnon, je te jalousais ton indépendance. Mais rien, ô rien, ne me fait douter de la communauté des écrivains. Je te retrouverai souvent dans l’espace de ma page blanche.


Tu as tout regagné, comme Ulysse tu retrouves ta compagne. Circé, la magicienne, l’avait endormie. Elle te reconnut par ton esprit si vif, qui atteint en plein cœur, l’ennemi de ton intégrité. Sage parmi les sages, les cités t'honorent. Tes aventures restent secrètes, pourtant clairs sont ton nom et ta signature.


Il y a une race humaine, et des races d’animaux. L’humain est une grande famille, alors que les animaux sont si différents.

En tant qu’humaine je mange des animaux. Nous ne mangeons pas les chats, ni les chiens, et je n’ai jamais mangé de cheval.

Bien sûr la science-fiction a imaginé des tas de choses. Même des pierres savantes !


L’objet pour moi est chose rare. J’aime l’outil de travail : cahier, stylo-encre, ordinateur, plumes à dessins...

Je n’aime pas la symétrie dans les objets, à part mes deux Bouddhas, qui d’ailleurs ne se ressemblent guère. Et puis ils représentent l’optique, ce qui est le cas de le dire, est cher à mes yeux.

Dans les meubles j’aime le moderne comme l’ancien.





Le 7 décembre 2014, Francine Laugier




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© Francine Laugier, le 7 décembre 2014.
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